La Maison Du Bon Sens… …Dans Le Bon Sens

22 février 2009

Orienter une maison plutôt au sud qu’au nord… C’est le début du « bioclimatisme », une conception de l’habitat qui veut restaurer quelques règles de bon sens, dans le sillage du développement durable et des « éco-matériaux ».

A l’occasion d’un salon à Poitiers, qui s’est tenu à la mi-octobre, deux architectes, Jocelyn Fuseau et Claude Micmacher (1) sont intervenus sur le bioclimatisme passif, un savoir millénaire réinventé depuis une dizaine d’années.
Jocelyn Fuseau – « Le bioclimatisme passif est quelque chose de tout simple : trouver de manière non coûteuse le moyen de satisfaire à la plupart de ses besoins énergétiques. Une maison classique orientée au sud reçoit au mois de décembre plusieurs fois l’énergie nécessaire à la chauffer. Il suffit de capter le rayonnement solaire par de larges baies extérieures et ensuite de stocker cette chaleur pour la restituer la nuit. Même si le système ne marche pas à 100 %, il permet d’économiser 30, 40 voire 50 % de sa facture énergétique. Le stockage de la chaleur du jour passe par la création d’une inertie thermique, grâce à une “peau intérieure” lourde et conductrice. En l’occurrence, le matériau de prédilection est la terre. Si l’autoconstruction en terre fonctionne très bien, il existe dans le commerce des produits normés comme les briques mono-mur de terre cuite, très faciles d’emploi par les entreprises. Attention à avoir une "peau extérieure" elle-même très isolante comme un revêtement à la chaux. La chaleur reçue pendant la journée est libérée pendant la nuit. Le “rendement” sera d’autant meilleur que la maison sera compacte, avec un rez-de-chaussée et un étage. Cette configuration offre deux fois moins de déperditions par le toit. Le système peut s’améliorer par la création d’un espace tampon intermédiaire comme une serre, qui facilitera le transfert de chaleur de l’extérieur vers l’intérieur. La serre, ouverte dans la journée, sera fermée la nuit. La Maison du Soleil à Rochefort (2), conçue suivant ces principes, ne consomme qu’environ 5 stères de bois par an. Ce qui fonctionne l’hiver en terme de récupération de chaleur peut très bien fonctionner l’été pour conserver la fraîcheur. Il suffit de prévoir un débordement de toit d’environ un tiers de la hauteur de la maison. L’été, le soleil, plus haut dans le ciel, ne rentrera pas tandis que le soleil rasant d’hiver n’aura pas de mal à pénétrer par les surfaces vitrées. Il est également possible de solliciter l’aide des végétaux à feuilles caduques qui, après avoir assuré une couverture ombragée en période estivale perdront leurs feuilles l’hiver ; ou encore par une pergola, recouverte de canisses l’été. Par ailleurs, il faut savoir que la sensation de chaleur ne se borne pas à une question de thermie mais aussi à une question de rayonnement. Si l’air est à 24° et les murs à 14°, on ne ressentira pas une sensation de bienêtre mais de froid. D’où l’intérêt d’avoir des murs chauds à l’intérieur de la maison grâce au bioclimatisme. Au Japon, existe en outre l’idée du “coeur chaud” de la maison. Une température égale partout ne distille pas la même impression de chaleur qu’un “coeur chaud”, apporté par un poêle nordique par exemple. C’est en actionnant plusieurs leviers du bioclimatisme que l’on peut économiser jusqu’à 50 % de son budget de
chauffage. »

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Un immeuble de Bressuire réhabilité selon les principes du bioclimatisme (maître d’ouvrage : OPAC Nord-Deux-Sèvres).

Claude Micmacher – « L’intérêt de recourir à des éco-matériaux est multiple. S’interpénètrent les notions de confort, de salubrité, d’économie et de responsabilité “citoyenne”. Aujourd’hui, sur l’ensemble de l’habitat français, la consommation moyenne d’énergie s’élève à 243 kW heure/m2. En 2050, l’idéal serait de tendre vers 100 kW heure/m2. Avec quels matériaux ? L’espèce de facilité générale consiste à aller chercher la solution la moins chère la plus vite construite : utiliser du polyester comme isolant, choisir la laine de roche au lieu du chanvre ou de la liane de mouton, préférer le ciment à la chaux, alors que la chaux est un matériau extraordinaire, qui existe depuis 5 000 ans. Il existe des produits non normés comme la paille, le bois cordé qui offrent de magnifiques possibilités. Mais sévit encore chez nous le syndrome des “trois petits cochons”. Aux Etats-Unis, des maisons de pailles ont 80 ou 100 ans et tiennent très bien. Sortir des sentiers battus pour aller vers l’éco-construction demande un effort de la part des ménages et un effort encore plus grand de la part des entreprises. Difficile de lutter contre les 5 000 points de vente de point P, la filiale de Saint-Gobain. Le coût de l’énergie commence cependant à devenir problématique. Le “tout électrique” issu d’une propagande d’EDF pour justifier une amplification du programme nucléaire dans les années 60/70 s’avère une véritable catastrophe pour le budget des particuliers. Le recours à des matériaux conventionnels réputés peu chers engendre souvent de fausses économies. Le polyester servant d’isolant dans les murs sert de refuge aux rongeurs. Après cinq ou six ans, les murs sonnent le creux et la maison n’est plus isolée. Même chose pour la laine de roche. Sous l’effet de l’humidité, elle est complètement buvardée. A force de se comprimer et de se décomprimer, elle n’assure plus son rôle. Au bout de sept ou huit ans, l’isolation devient pratiquement nulle alors que les occupants croient toujours être bien protégés. A contrario, des matériaux naturels comme la laine de mouton, la laine de chanvre, la laine de bois, le liège se regonflent indéfiniment. L’investissement de départ est peut-être quatre à cinq fois plus élevé mais la durée de vie sera de cinquante ans. Et contrairement à une idée préconçue, les mites, les loirs ou les souris n’aiment pas la laine de mouton ! A ce jour, ces matériaux représentent peut-être 2 % du marché de l’isolation. Un aspect très important concerne la salubrité du bâti et notamment la migration de la vapeur d’eau de l’intérieur vers l’extérieur. Une famille de quatre personnes génère l’équivalent d’un seau d’eau toutes les 24 heures. Utiliser des parpaings ciment, réaliser un enduit ciment à l’extérieur revient à créer une peau imperméable. Même chose pour le placo à l‘intérieur, qui ne permet pas la migration de l’humidité, contrairement au chanvre, à la terre crue ou cuite. En considération du temps passé dans le logement, il est important de se préoccuper de ces dimensions liées à l’environnement, la santé, le confort. »

 

 (1) Jocelyn Fuseau est architecte DPLG à Bressuire (79), Claude Micmacher anime ’Ecocentre du Périgord, lieu d’expérimentation, de démonstration et de formation de la construction écologique et des énergies renouvelables au sein du parc naturel régional Périgord-Limousin (Froidefon, 24450 Saint-Pierre-de-Frugie).
(2) Maison du Soleil : 12, rue de la Mauratière, Rochefort (propriétaire : Jean-Paul Blugeon).

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