des approches de taille « pragmatiques » dans les vignes grêlées

26 janvier 2017

Comment faut-il aborder la taille des vignes grêlées à plus de 70 % ? Cette préoccupation hante l’esprit de beaucoup de viticulteurs car l’architecture des souches a été complètement déstructurée. L’équipe de techniciens de la chambre d’agriculture de la Charente a organisé plusieurs réunions de terrain pour essayer de définir des stratégies de taille rationnelles sur le plan technico-économique. Le fil conducteur de leurs messages est de privilégier les aspects de reconstruction des ceps quel que soit le mode de taille mis en œuvre.

Les différents épisodes de grêles qui ont touché le vignoble Charentais au cours du cycle végétatif 2 016 ont beaucoup dégradé l’ensemble de la végétation et la qualité des bois de taille. Ce sont dans les parcelles grêlées à plus de 70 % que la situation est la plus préoccupante. Les beaux bois de taille issus des coursons de l’hiver dernier ont souvent disparu ou sont en très mauvais état. Il existe en fait deux situations bien distinctes en fonction de l’époque des sinistres de grêle, soit plus précoce à la fin mai, soit plus tardif de la fin juillet à début septembre. L’état du capital de bois de taille dans ces contextes est à la fois très fragilisé et bien différent. L’équipe de techniciens viticole de la chambre d’agriculture de la Charente a organisé plusieurs réunions pour essayer d’aider les viticulteurs à appréhender les travaux de taille dans les meilleures conditions. Le discours de Jean-Christophe Gérardin, le conseiller viticole repose à la fois sur la présentation de données agronomiques et physiologiques propres à l’ugni blanc et aussi sur les retours d’expériences de propriétés ayant été fortement grêlées en 2014. Les parcelles fortement grêlées portent un capital de bois fragile, amoindri en bourgeons fructifères et dont les vaisseaux dalimentation de sève sont abîmés.


Une végétation principalement issue de gourmands peu fructifères dans les vignes grêlées précocement

 

Les premiers sinistres qui sont intervenus le 28 mai sur une végétation tendre et poussante, avaient défolié les souches à 90 % et cassé beaucoup de jeunes sarments. La végétation qui a repoussé au cours de lété, est issue de gourmands sortis sur les troncs et les têtes de souches et provient d’entre-coeurs (développé sur les fragments de sarments verts épargnés par la grêle). Un tel capital de bois ne représente pas une belle base pour reconstruire la structure des souches cet hiver d’autant que les différences d’état de la végétation entre les parcelles sont souvent importantes. Les effets vigueur, potentialités agronomiques, âge des vignes et entretien des vignobles après la grêle ont eu une incidence sur les capacités de repousse des souches au point que certaines parcelles ont retrouvé une certaine quantité de bois et d’autres semblent très chétives. La présence de nombreux gourmands qui sont nettement moins fructifères avec un cépage comme l’ugni blanc, est un sujet de préoccupation pour la prochaine récolte. Ensuite, les bases de la taille en guyot double Poussard sont remises en cause puisque les sarments issus des coursons sont très rares. Le respect des bons principes de la circulation de la sève a été véritablement fragilisé. La végétation a repoussé là elle a pu ! Par contre, le bel été et lautomne clément ont permis davoir un aoûtement correct.

 

 

Des sarments principaux porteurs de bourgeons principaux très abîmés dans les vignes grêlées tardivement

 

Les sinistres de grêle à partir de la fin du mois de juillet sont intervenus sur une végétation bien développée et des sarments déjà rigides. L’état de défoliation a été souvent très important et beaucoup de sarments sont marqués par des blessures profondes (allant jusqu’à la moelle). Souvent, une forte proportion de bourgeons principaux semble abîmée et peu aptes à favoriser le développement dune végétation équilibrée au printemps prochain. Dans les conduites de vignes à port libre, lintensité des dégâts a été encore plus forte en raison de la puissance des vents lors du sinistre. L’état d’aoûtement des bois dans les zones grêlées tardivement est très variable, parfois juste correct et malheureusement aussi souvent insuffisant. D’une manière générale, les vignes fortes sur le plan agronomique qui ont été en mesure de reconstituer leur capital de feuilles en trois ou quatre semaines, ont pu tirer profit des conditions climatiques assez clémentes d’octobre. Laoûtement parfois incomplet, l’importance des blessures sur les bois et la disparition de beaucoup de bourgeons principaux constituent des problématiques très particulières pour aborder la taille. Létat de fragilité des bois et le moindre potentiel de bourgeons fructifères restants seront-ils en mesure de permettre de mettre en œuvre une taille conciliant les attentes de productivité et la pérennité des souches.


Une inquiétude véritable pour le potentiel volumique de la récolte 2 017

 

       Les viticulteurs qui rentrent actuellement dans leurs parcelles pour tailler regardent avec inquiétude l’état des souches surtout quand ils font appel à de la main-d’œuvre extérieure. Comment faut-il aborder la taille dans les vignes très abîmées ? Le bon sens pousse à privilégier la reconstruction pérenne des ceps en essayant avant tout de retrouver des coursons bien placés par rapport aux courants de sève mais il convient aussi de prendre en compte les réalités économiques. Le potentiel de récolte, l’année suivant une grêle sévère est malheureusement toujours nettement moindre. Or, les exigences de saine gestion des propriétés rendent nécessaire d’essayer d’atteindre des niveaux de productivité suffisants couvrant les charges de production car aucune assurance ne permet à ce jour d’indemniser les pertes de récolte l’année suivant une grêle. Les conditions de taille 2016/2 017 seront donc très compliquées compte tenu de la qualité des bois et de l’objectif double de concilier la reconstruction des ceps et la recherche de niveaux de production suffisants.

 

Tenir de la dégradation des vaisseaux d’alimentation de sève et des bourgeons principaux

 

      J-Ch Gérardin et ses collègues ont mené une réflexion globale pour aider les viticulteurs à gérer la taille en conciliant les enjeux technico-économique à court et moyen terme : « Après des sinistres dune intensité aussi forte, limpact sur les ceps de vignes se fera sentir lannée prochaine au niveau des rendements. Néanmoins, les résultats des essais que nous avons mis en place suite aux épisodes de grêle de 2014 représentent des acquis importants. Cette année nous sommes confrontés à deux types de dégâts bien différents qui au final affectent fondamentalement l’architecture de la taille et réduisent les perspectives de production du millésime à venir. Dans les vignes grêlées précocement, la végétation est constituée principalement de gourmands porteurs de bourgeons peu fructifères qui se sont développés de façon anarchique et rarement sur les coursons de l’année précédente. Les bases de la taille historique des parcelles sont donc profondément déstructurées et la recherche d’une charge de bourgeons fructifères suffisante va être plus compliquée. Dans les vignes grêlées tardivement, les sarments présents sont issus des bases de la taille de l’année précédente mais leur qualité est très inquiétante. Les blessures souvent profondes ont affecté les vaisseaux d’alimentation de la sève en dessous l’écorce et ont rendu très fragile les bois ( risque de casse accrus au moment de l’attachage). En plus sur ces sarments, la proportion de bourgeons principaux détruits par les grêlons est forte ce qui va poser des problèmes pour le potentiel de production volumique du millésime 2 017 »

 

Laisser des coursons de reconstructions quel que soit le mode de taille

 

La réflexion technique au niveau de la taille proposée par les conseillers viticoles est l’aboutissement d’un compromis associant la reconstruction des ceps et la recherche d’un potentiel de charge de bourgeons fructifères équilibré. La priorité sera d’essayer de laisser des coursons bien placés par rapport au courant de sève pour être en mesure de retrouver des principes de taille cohérents au cours de l’hiver 2017/2018. Les viticulteurs peuvent être tentés de laisser des charges de bourgeons beaucoup plus importantes mais cela risque de nuire à la qualité du débourrement. J-Ch Gérardin pense qu’après une grêle, il faut tailler en privilégiant toujours le devenir des souches à moyen terme : « En 2014, nos essais de taille courte avec plusieurs demi-lattes de 3 à 4 bourgeons comparés à seulement deux bois plus longs de type guyot double ont surtout démontré l’importance du bon positionnement des coursons qui représentent le pilier d’une reconstruction pérenne des ceps. La taille des vignes grêlées nécessite une réflexion approfondie et plus de compétences car chaque souche est pratiquement un cas particulier. Tailler en guyot va demander plus de temps et ensuite l’attachage des bois nécessitera beaucoup de doigté. Les stratégies de taille courtes représentent une alternative attractive sur le plan économique du fait des temps de travaux moindres mais il faut quand même repasser dans les parcelles pour sélectionner les coursons de reconstructions ».

     

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